Le fait de s’injecter soi-même une thérapie soulève une myriade de questions éthiques. Avant de procéder à son expérience, Brian Hanley dit avoir contacté la Food and Drug Administration, l’agence fédérale américaine qui réglemente les études sur les nouveaux médicaments.
« Je leur ai demandé s’ils avaient une procédure pour les notifier de ce que j’allais faire. Ils m’ont répondu que ça n’existait pas », dit-il à La Presse. M. Hanley dit plutôt avoir obtenu un avis éthique favorable de l’Institut de médecine régénératrice et cellulaire, à Santa Monica, en Californie. La Presse n’a pu contacter l’Institut, dont la page web ne fonctionnait plus au moment où nous l’avons consultée.
Les experts en éthique sont réticents à commenter le cas de Brian Hanley. À la suite du dévoilement de son histoire par la MIT Technology Review, Brian Hanley a envoyé une lettre au service juridique de la publication pour se plaindre de l’article. Échaudés par ses démarches, trois spécialistes en bioéthique ont refusé de commenter son cas à La Presse, disant craindre des problèmes.
Henry Greely, directeur du Centre sur le droit et les biosciences de l’Université Stanford, a quant à lui accepté de parler. Selon lui, le flou qui entoure l’avis éthique obtenu par Brian Hanley devrait être considéré comme un « drapeau d’avertissement ». Il qualifie la démarche dans son ensemble d’« irréfléchie » (foolish).
« Il est hautement improbable que l’expérience ait des effets positifs pour lui, il est hautement improbable qu’elle conduise à des conclusions scientifiques utiles et elle pourrait fort bien conduire à des effets négatifs pour lui. »
— Henry Greely, directeur du Centre sur le droit et les biosciences de l’Université Stanford
Des risques, Brian Hanley est le premier à reconnaître qu’il en a pris. Selon Bobby Dhadwar, de l’Université Harvard, le principal était que les hormones produites par la thérapie soient légèrement différentes de celles produites par son corps, ce qui aurait pu amener son système immunitaire à les attaquer. M. Dhadwar s’est dit aussi « surpris » de voir Brian Hanley avoir recours à un procédé aussi douloureux que l’électroporation pour favoriser l’intégration de la thérapie dans ses cellules.
Dans le pire scénario, dit l’expert, le matériel génétique introduit artificiellement aurait pu s’intégrer au génome de ses cellules, ce qui aurait sans doute provoqué une tumeur cancéreuse.
« Cette possibilité me semble faible et, dans l’ensemble, je ne crois pas que les risques soient aussi grands qu’ils le paraissent, dit M. Dhadwar. Cela étant dit, je ne recommande évidemment pas aux gens de s’utiliser eux-mêmes comme des cobayes d’expérience. »
« J’avais décidé depuis longtemps que c’est la façon dont je procéderais, dit quant à lui Brian Hanley. Si je ne suis pas assez confiant pour le faire sur moi-même, pourquoi je le ferais sur quelqu’un d’autre ? »
Scientifiques irresponsables ?
À la fin du mois de novembre, la BBC a rapporté l’histoire de Tristan Roberts, un Américain de 28 ans qui s’est injecté une thérapie génique expérimentale dans le gras du ventre dans l’espoir de se guérir du VIH. Comme Brian Hanley, M. Roberts s’est injecté des morceaux d’ADN. Dans son cas, ces fragments sont censés pouvoir fabriquer des anticorps qui, en laboratoire, ont réussi à neutraliser 98 % du VIH.
La manœuvre a été diffusée en direct sur Facebook Live. Irresponsable et vain ? C’est ce qu’ont dit plusieurs chercheurs en voyant la tentative du jeune homme. Mais M. Roberts, qui est épaulé dans ses démarches par Aaron Traywick, président d’une petite entreprise derrière le traitement, voit les choses différemment.
« Nous sommes des preneurs de risque, mais nous ne sommes pas stupides, a-t-il dit à la BBC. Je pense que nous arrivons à une époque où les patients et les sujets de tests sont capables de s’investir de façon plus importante dans les résultats de l’expérience. »
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